Les cliniques privées en colère feront grève le 30 mars

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Les cliniques privées en colère feront grève le 30 mars
Maroc
Crédit : College syndical

L’Association nationale des cliniques privées (ANCP), et le Collège syndical national des médecins spécialistes privés (CSNMSP) annoncent un mouvement de grève le 30 mars prochain, sans précédent dans le secteur de la santé privée marocaine.

Le mal-être de la profession avait encore été évoqué lors de l’Assemblée Générale  de l’ANCP à laquelle nous avions assisté le 1er mars dernier à Casablanca.  S’inspirant de leurs confrères tunisiens, les membres avaient alors avancé l’idée d’une journée de grève pour se faire enfin entendre.

Les 3èmes Assises Nationales de Marrakech qui se sont tenues du 17 au 19 mars ont abouti à la confirmation de l’utilisation de ce moyen d’expression assez inhabituel pour la profession.

Quelles sont les revendications ?

  • La dignité qui serait, à leurs yeux, bafouée régulièrement par plusieurs intervenants de la société dont les médias et même au plus haut niveau du gouvernement. «Les brebis galeuses courent partout. Des cas d’exception se trouvent dans tous les métiers. Rien ne justifie la généralisation du comportement irresponsable de certains médecins», souligne Dr Afif, président du CSNMSP
  • la mise en place d’une assurance maladie et d’une retraite au profit des professionnels de la santé : «Nous n’avons ni couverture médicale ni assurance retraite», clament-ils haut et fort. «Nous déployons tous nos efforts à porter secours aux citoyens pour perpétuer le progrès incessant que connaît régulièrement la médecine dans notre pays, mais nous restons abusivement dans la difficulté quand, nous-mêmes et nos proches, avons besoin de soins médicaux», peut-on lire dans le communiqué conjoint du CSNMSP et de l’ANCP
  • La révision des tarifs de la convention collective au titre de l’AMO : les médecins privés veulent attirer l’attention sur les aberrations de la couverture médicale de base au Maroc, en particulier l’AMO et les tarifs de la convention collective de 2006. Pour eux, l’AMO connaît «de grands déboires dans son inadéquation totale avec l’esprit d’une médecine de qualité». Ladite convention, ajoute-t-on, reste «figée» bien que la loi a prévu sa révision régulière tous les trois ans, alors que le citoyen continue à débourser de sa poche, en moyenne, 54% du prix des soins. La non revalorisation des tarifs de l’AMO est à l’origine d’un climat de tension entre les patients et les médecins.  Les médecins sont encore plus étonnés de voir les deux organismes gestionnaires de l’AMO, la CNOPS et la CNSS, afficher un excédent dépassant les 25 milliards de DH. «Nous ne voulons pas être le bouc émissaire de l’AMO. Nous refusons de cautionner le non-respect du juste prix au bénéfice des citoyens», prévient le président de la CSNMSP.

Lors de l’AG du 1er mars, des exemples avaient été donnés :

Une journée de réanimation, respectant les normes internationales scientifiques de qualité, coûte 4.500 DH. Or dans la pratique de l’AMO, la réanimation est définie et payée à 1.500 DH (1125 DH pour le réanimateur et 375 DH pour l'hospitalisation), soit un prix inférieur à celui d’une chambre d'hospitalisation médicale simple.

«Comment va-t-on payer le reste des soins réputés très coûteux ? Comment la clinique peut-elle encaisser un surplus ne serait-ce que pour amortir l'investissement et rester dans la capacité de soigner le citoyen avec efficacité ?», s’interroge Dr Agoumi, ex-président de la CSNMSP

  • La mise en place du droit à la Formation Continue

Les cliniques privées en colère feront grève le 30 mars

Crédit : College syndical

Quelles sont les réponses formulées ?

Lors de la dernière réunion organisée avec  Houssein El Ouardi, ministre de la santé et le directeur de l’Agence nationale de l’Assurance Maladie (ANAM), des propositions ont été formulées aux Médecins :

  • mettre en place des programmes de communication (tel le médecin de l’année ou la clinique de l’année…) visant à mettre en avant les prouesses et les exploits des médecins, en vue de lutter contre les campagnes de diffamation et de dénigrement.
  • toujours sur le volet de la crédibilité et de l’image des médecins : désigner des avocats dans les 12 régions pour accompagner les plaintes des professionnels.
  • A propos de l’Assurance Maladie des Médecins, il a été avancé que «Le projet de loi est validé en commission dans les deux chambres, en plénière dans la 2ème chambre et en attente de validation en séance plénière au niveau de la première chambre».
  • accélérer la mise en place du texte de loi relatif à la responsabilité médicale.
  • concernant la convention nationale des organismes gestionnaires de l’assurance maladie obligatoire et les médecins du secteur libéral et les cliniques privées, le Ministre a promis de procéder à un arbitrage. Lequel devrait obliger la CNOPS et la CNSS à une séparation de la convention nationale des cliniques de celle des médecins du secteur libéral, ainsi que procéder à la revalorisation de la tarification nationale de référence.
  • concernant la formation continue, devenue obligatoire (dans le cadre des lois 08-12 relative à l’ONDM et 131-13 relative à l’exercice de la médecine), le département de la Santé a annoncé une réunion le 22 mars avec le secteur public pour étudier les modalités de sa mise en place.

Mais ni la promesse faite par le ministre de la Santé, ni la position de l’Agence nationale de l’assurance maladie n’ont convaincu les médecins et cliniques privées d’annuler l’appel à cette grève.

Le 1er mars 2017, le principe de la grève avait été entériné à la majorité

le 1er mars 2017, le principe de la grève avait été entériné à la majorité | Crédit : College syndical

Ainsi, le 30 mars prochain, dans toutes les régions du Maroc, les cabinets doivent rester fermés (pas de secrétaire au cabinet) nous a confié le Directeur de la clinique Californie à Casablanca. Cependant, le même mot d’ordre indique aussi que par souci du respect de l’éthique et de la déontologie « les urgences seront assurées dans les cliniques »